3 mai 2012

san tian zai beijing (3 jours à Pékin)





Ni hao !

Mi-avril, nous avons réussi à programmer un week-end à Pékin, à l'occasion d'un déplacement professionnel pour François.  Evitant à la fois les hivers glacés (le vent vient directement de la Sibérie !), les étés étouffants et humides ou les tempêtes de sable du printemps, nous avons bénéficié d'une météo formidable pour nos 3 jours sur place. 29 degrés, soleil et ciel à peine voilé, arbres en fleurs, nous avons été gâtés.



Pékin (Beijing en chinois, ce qui signifie capitale du nord) est une ville immense, très polluée, et les bouchons sont fréquents à toute heure. Notre hôtel étant idéalement situé à un jet de pierre des douves de la Cité Interdite, nous avons donc  préféré découvrir  la ville à pied, en bus ou en métro, plus rarement en taxi. A Pékin, tout est plus grand et imposant qu'à Shanghai : certaines avenues sont gigantesques  (on les appelle dajie, ce qui veut dire grande rue) et intraversables à pied, (il faut chercher le passage souterrain qui permet de passer de l'autre côté). Les monuments de l'époque communiste (musées ou mausolées) sont également gigantesques et dans un style architectural massif, qui n'est pas sans rappeler l'architecture soviétique !
 
Le plan de la ville est assez simple, tout est orienté Nord Sud et Est Ouest. Des périphériques circulaires cloisonnent la ville en différents secteurs, first ring, second ring, plus le ring est élevé, plus on habite loin du centre ville.

Le cœur de la ville est bien sûr la Cité Interdite, qui jouxte la place Tian An Men, sur laquelle se trouve le mausolée de Mao.  Nous n'avons pas eu le temps (ni l'envie !) de le visiter, même s'il paraît que toute la Chine défile devant  le corps embaumé du "Grand Timonier",  protégé par un couvercle en verre. Cette immense place Tian An Men peut accueillir 1 million de personnes.

Comme le niveau de vie augmente en Chine, les Chinois voyagent de plus en plus, venant des 4 coins du pays.  Impossible  pour nous de différencier les habitants du Sichuan de ceux originaires du Guizhou ou du Hunan ! Certains  ont la peau plus cuivrée (ils portent souvent des vêtements plus rustiques), d'autres ont des faces assez plates et larges (comme Mao) qui font penser aux Han.  Nous arrivons tout de même à repérer ceux qui ont le moins l'air asiatique, notamment les Uygur, issus du Xinjiang, une province autonome située au nord-ouest de la Chine et qui jouxte le Moyen-Orient. Ils ressemblent à des Turcs, avec leurs têtes de Tatars, leurs femmes portent des vêtements bariolés et des foulards multicolores. Le spectacle des familles Uygur est plutôt pittoresque et réjouissant,  entre les enfants endimanchés, les femmes quasi voilées et le père avec sa fière bacchante trônant au milieu de sa  famille pour la photo souvenir devant  la Cité Interdite et le portrait de Mao .
La porte Tian An Men
 
Les foules de touristes sont particulièrement impressionnantes à Pékin. Mais, sans doute habitués depuis leur plus tendre enfance à marcher au pas et obéir aux ordres, les groupes de Chinois se succèdent dans la bonne humeur, chacun suivant son guide et le fanion correspondant à la couleur de la casquette qu'on leur a vissée sur la tête.




Les militaires en uniforme sont omniprésents tout autour de la Cité Interdite et déambulent avec un air martial, qui ne masque guère leur jeune âge.  De  nombreux policiers en civil rôdent sur la place Tian An Men, qui est quasiment le symbole de la résistance et a été le lieu de grandes manifestations, parfois réprimées dans le sang... histoire de prévenir d'autres débordements.
 
Le premier jour, j'ai beaucoup marché dans le centre ville, de la porte du Midi (au sud de la Cité Interdite) à la porte Tian An Men (qui signifie la Porte de la Paix Céleste). C'est depuis cet édifice que Mao proclama la fondation de la République Populaire de Chine en 1949.


Puis j'ai fait le tour de la place Tian An Men  et déambulé dans les hutongs du quartier de Qianmen. Les hutongs sont des quartiers typiquement pékinois, qui se sont construits autour de puits d'eau et d'abreuvoirs (les hutongs), depuis que les Mongols ont fait de Pékin leur capitale. Les habitants ont construit anarchiquement  des petites habitations traditionnelles  autour de cours fermées et on a  parfois l'impression de se trouver dans un labyrinthe de ruelles étroites ! De nombreuses portes en bois portent des inscriptions censées protéger des mauvais esprits. La vie dans ces hutongs n'a pas beaucoup changé depuis quelques dizaines d'années, sauf lorsqu'ils sont rénovés pour attirer les touristes...

 De très nombreux hutongs ont été détruits depuis les années 80 et l'ouverture du pays par Den Xiaoping. Les habitants sont généralement relogés dans des immeubles éloignés du centre, et s'ils y gagnent en confort de vie (avec notamment de vraies salles de bains, des toilettes...), ils doivent  sans doute repartir à zéro pour ce qui est de leur vie sociale. Il reste fort heureusement de nombreux hutongs, et c'est très pittoresque de les parcourir à pied. Il y a des formules pousse-pousse à vélo pour les paresseux, mais je trouve que ça a des relents de colonialisme, donc nous avons marché...


Pour le déjeuner,  j'ai  testé un restaurant très couleur locale, attirée par une petite publicité à l'extérieur : l'adresse était recensée (à défaut d'être encensée) dans un guide touristique anglophone. Je n'ai pas trop mal mangé, mais comme je ne suis jamais sûre des conditions d'hygiène dans lesquelles la nourriture est préparée/ les assiettes lavées/ les mains du cuisinier... bref, je me suis bu un coca deux heures après, puisque paraît-il c'est très corrosif (pour les petits microbes ?) et anti-émétique.

Le lendemain, nous avons pris le métro pour aller au Palais d'Eté, enfin celui qui n'a pas été brûlé, pillé, dévasté par les Français et les Anglais en 1860. Un épisode des guerres de l'Opium qui a de quoi nous faire rougir de honte !!!
Comme dans tous les monuments, parcs ou attractions chinoises, on trouve des dizaines de petits vendeurs à la sauvette, qui se trouvent fort opportunément sur le trajet des touristes. Petites brochettes grillées, quartiers d'ananas ou de pomelos sur des piques, glaces à la menthe pour 1 rmb (10 centimes), sodas, bouteilles d'eau, bobs et couvre-chefs variés, (parapluies lorsqu'il pleut), la foule serpente entre les vélos trafiqués pour devenir carrioles ou barbecues et la rue  où passent sans ralentir bus, voitures, vélos électriques et tous ces véhicules non homologués typiquement chinois. Mais on ne sent jamais d'impatience ou de fébrilité, tout le monde se croise ou se bouscule dans la bonne humeur ou l'indifférence.
 
Le Palais d'Eté occupe la  Colline de la Longévité, qui domine le beau lac Kunming (très Feng Shui !). On y accède par la porte du Nord et on commence par monter dans la rocaille, avant de redescendre vers la rive du lac, en traversant divers temples, pagodes ou pavillons  et  en suivant de longs corridors protégés du soleil ou des intempéries par une superbe charpente très colorée, avec des tuiles vernissées vert-bleu.  C'est superbe, mais on se demande bien où et comment vivaient les gens ici. Partout, des statues de pierre (lions, dragons, bouddhas divers et variés ...), des bronzes, des arbres en fleurs entre les temples, et des centaines de marches d'escaliers.  
 















Ce palais est associé à la dernière impératrice douairière Cixi (prononcer tseuchi), une concubine de troisième rang de l'empereur Xianfeng. En donnant naissance au fils de l'Empereur, elle "monte en grade" et manœuvre ensuite habilement pour devenir régente de son fils, puis de son neveu, au mépris de toutes les lois de succession. Elle gouvernera la Chine pendant près de 50 ans, de 1861 à 1908 et signera la fin de la Chine Impériale.
Elle fit faire des travaux grandioses au Palais d'Eté,  sur des fonds publics destinés à la flotte impériale. On visite encore son bateau de marbre 
(qui ne put ja-ja-jamais naviguer..., mais où on lui servait du thé), un théâtre où elle faisait jouer des opéras par une troupe de 384 eunuques, et divers palais et jardins superbes. Au  milieu du lac, on accède à une petite île par un pont aux 17 arches et on peut monter au  temple du Roi-Dragon.
 

 

le bateau de marbre
vue sur le lac Kunming






pavillon de musique et de danse








Dans l'après-midi, nous avons longé les rives du lac Beihai et visité le Dagoba  blanc, un sanctuaire  bouddhique datant de 1651 et construit en style tibétain. Le soir, un peu lassés de la nourriture chinoise, nous nous sommes vengés sur la formule buffet d'un grand hôtel de Pékin, et surtout sur les fromages et les desserts (absents des menus chinois...)

Pour notre troisième et dernier jour à Pékin, nous avons longuement visité la Cité Interdite, ce qui nous a tout de même pris 4 heures. Quand on pense que les tours- opérateurs le proposent en 1h30, j'imagine que les pauvres touristes doivent traverser au pas de charge ! 



Ce palais fut la résidence impériale de 1421 à 1911.  Les murs extérieurs sont très imposants et cernés de douves. Après être rentré par la Porte du Midi et avoir passé la porte de l'Harmonie suprême, nous avons  parcouru une succession de palais et de cours, aux noms évocateurs (Palais des Elégances accumulées ??? Porte de la vieillesse sereine, Salle de la nourriture de l'Esprit et j'en passe). Au sud du Palais, tout est immense et on peut imaginer les processions qui devaient avoir lieu sur les grandes esplanades.





 Plus on monte vers le nord, plus les bâtiments redeviennent à taille humaine, même si on a constamment l'impression d'être dans un labyrinthe. Quelques meubles poussiéreux permettent d'imaginer la vie des concubines et des impératrices, mais rien de grandiose. Tout a dû être pillé ou brûlé.




Après toutes ces pierres et ces murs épais, l'arrivée dans un superbe jardin traditionnel situé dans le coin nord-ouest de la Cité Impériale est une vraie bouffée d'oxygène.


Nous sommes ensuite sortis  de la Cité Interdite par  la Porte du Génie militaire  et avons escaladé la colline de Charbon (érigée au Nord du Palais, elle respecte là encore les règles du Feng Shui). Cette butte artificielle fut construite au 15ème siècle avec la terre de remblai des douves et elle offre un point de vue remarquable sur la Cité Interdite. Dans les jardins, nous avons croisé une chorale amateur, autour d'un accordéon et d'un chef de chœur très enthousiaste. Nous l'avons constaté dans tous les lieux publics (parcs, jardins, lacs...), les Chinois s'approprient l'espace et viennent seuls, en famille ou avec des amis, danser, chanter, pratiquer le Tai Chi, sans se soucier du regard des autres. Ils jouent aux dames (chinoises), au Mah Jong, promènent leurs oiseaux,  lancent des cerfs-volants très très haut dans le ciel, bref il y a beaucoup de vie et c'est pour nous un spectacle permanent et bon-enfant.

Et pour finir ce formidable week-end, nous avons testé le train de nuit Pékin-Shanghai.
La gare de Pékin était fort embouteillée par tous les Chinois rentrant le dimanche soir et nous avons eu beaucoup de mal à accéder à notre quai.  Heureusement, le compartiment s'est avéré très confortable, avec 4 couchettes, de la literie très propre et  un petit écran de télévision au pied de chaque lit.

François et moi ayant mal anticipé le repas du soir, nous avons testé le wagon-bar, très similaire à celui de la SNCF. Mais il y avait une grosse différence : le menu était en caractères chinois, donc totalement incompréhensible pour nous. Nous avons donc commencé à scruter les et sachets plastique rangés derrière le bar, qui contenaient des aliments sous vide pas toujours identifiables ou appétissants (crêtes de  coq !). C'est bien la première  fois que nous avons regretté le sandwich SNCF ! L'hôtesse nous a finalement proposé un canard laqué sous vide (de loin le plus cher sur sa liste !), qu'elle a fait réchauffer au micro-onde et a bien voulu ouvrir pour nous. Ensuite, nous nous sommes retrouvés très bêtes, en réalisant que nous n'avions aucun couvert, ni baguette pour manger le volatile (bien sûr, l'hôtesse n'avait rien pour nous dépanner...). Nous avons donc mangé avec nos doigts, (très vite couverts de graisse...) et certainement constitué un spectacle intéressant mais peu ragoûtant pour nos voisins de table chinois. Moralité : la prochaine fois que nous prendrons le train de nuit, nous apporterons notre manger !

Ces trois jours à Pékin ont donc été bien remplis, même s'il nous reste encore de nombreux trésors à découvrir. J'aurai l'occasion de revenir fin mai, pour accompagner une amie française de passage et j'en profiterai certainement pour visiter le temple du Ciel ou le Palais de l'Eternelle Harmonie.

Si vous avez envie de découvrir à votre tour ces trésors du patrimoine mondial, venez nous rendre visite en Chine !